La veille de Pessah, les Israéliens se préparent à célébrer en famille la grande fête de la libération. Le repas de Pessah qui marque cet événement fondateur dans l'histoire du peuple juif est également l'occasion de se retrouver en famille -enfants, parents et grand-parents- pour fêter ensemble la sortie d’Egypte, la libération de l’esclavage et la prise de conscience du destin national. Les Hébreux de l’Egypte des pharaons n’étaient pas encore des Juifs. Ils le sont devenus en passant de la situation de peuple opprimé à celle de nation qui se construit et qui reçoit à l'issue de quarante années d'errance dans le désert, les tables de la Loi et la Torah.
Je voudrais m’attarder un instant sur ce passage : les Hébreux qui deviennent des Juifs en recevant le texte divin qui deviendra la base fondamentale de la civilisation occidentale.... Les 210 ans de présence hébraïque en Egypte n’ont pas réussi à détruire l’idée de liberté, de volonté de revenir dans le pays de leurs ancêtres. Il aura quand même fallu l’arrivée d’un chef éduqué à l’égyptienne pour mener les Hébreux en dehors d’Egypte et commencer l’histoire d’Israël en terre de Canaan. Sans leader, sans Moïse, il se peut que les Hébreux se soient perdus, voire éteints dans les nuits égyptiennes. D’ailleurs, n’oublions pas que seul un cinquième des Hébreux a quitté l’Egypte sous le commandement de Moïse. Les autres, apeurés face à l’incertitude, inquiets quant à leur destin personnel, nostalgiques d’une Egypte que l’on abhorrait mais que l’on aimait aussi un peu, ne se sont pas joints à la grande Histoire d’Israël. Ils s'en sont détachés. Pessah est donc une véritable révolution à la fois nationale et personnelle au cours de laquelle les Hébreux ont mêlé prière et action pour se libérer.
Lorsque l'on fêtera Pessah, je pense qu'il serait bon de faire un bilan pour savoir si aujourd'hui nous serions capables d'une telle révolution, capables d'un tel bouleversement sur le plan national comme personnel. Bien sûr, il n'y a plus de puissance pharaonique pour opprimer le peuple d'Israël. Mais il y a comme une sorte de pesanteur invisible qui nous oppresse, une sorte de liberté limitée. Les menaces existentielles, d'abord, qui pèsent sur le pays et qui deviennent de plus en plus inquiétantes. Nous pensons à l'Iran, à la Syrie, à l'intégrisme en général.
Mais désormais, si nous sommes enfin chez nous, nous n'avons plus d'autre endroit où aller. Comme si le départ vers un meilleur ailleurs avait été remplacé par un mouvement non pas géographique mais spirituel, psychologique, interne. L'Israélien à la veille de ce Pessah répétera la prière ancestrale: « l'année prochaine à Jérusalem ». Peut-être ajoutera-t-il une autre prière. Celle-ci, par exemple: « fais germer la royauté en Israël ». Et comme la semence qui se désintègre avant de germer, prions pour que de cet état de « décomposition » de notre société surgisse un vrai leadership qui sache nous guider à la fois au niveau spirituel, mais aussi politique. Quelqu'un avec qui nous pourrions, s'il le faut, marcher dans le désert, sachant qu'au bout de la marche nous attend une structure solide qui nous permetterait de renaître et de réaliser la mission du peuple juif.
Les Israéliens sont plus que jamais amers et angoissés.Même lorsque l'on parle de négociations de paix, il n'y a pas de véritable euphorie. Il faut plutôt parler de manque de confiance: les leaders ne sont pas à la hauteur de la tache.
Depuis la « retraite » de Sharon et la guerre du Liban II, les Israéliens sont en quête d'un chef. La démocratie israélienne se cherche un roi pour la sortir de la torpeur et la libérer. Mais de quoi au fait?
D'une atmosphère lourde, d'une presse qui jour après jour, révèle de grands scandales sur les hommes supposés diriger le pays, de l'angoisse de ne pas savoir où l'on va.
Certes, au temps de Moïse aussi, en quittant la servitude, nul ne savait
exactement ce qui l'attendait. Mais les Hébreux devenus Juifs avaient confiance
en leur leader. Espérons que les Juifs devenus Israéliens referont confiance en
leurs dirigieants. Ou plus précisément que ceux mériteront de nouveaux la
confiance du peuple. Pessah cette année pourrait être ressenti, non pas
seulement comme le rappel de la sortie d'Egypte, mais aussi comme un appel à
un grand leadership. L'année prochaine à Jérusalem, qui sera le prochain roi?
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